L’accident du travail est l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail. Il se caractérise notamment par un élément de soudaineté qui le distingue de la maladie, considérée comme le résultat d’un processus évolutif. En outre, il faut que le fait accidentel ait une date certaine. C’est la raison pour laquelle au titre d’une jurisprudence très ancienne mais constante les maladies contagieuses ne sont généralement pas prises en charge au titre des accidents du travail (Cass. ass. plén. 21 mars 1969, n° 66-11.181 s’agissant d’un médecin ayant contracté la poliomyélite après avoir examiné dans son service un malade souffrant de cette affection ; Cass. soc. 17 novembre 1971, n° 70-13.709 pour une dysenterie bacillaire due à l’absorption, en brousse, d’eau impropre à la consommation ; Cass. soc. 18 avril 1991, Pitoif c/ CPAM des Yvelines, pour une affection pathologique dont un salarié était atteint après avoir été en mission à l’étranger).
En principe, et sauf évolution de la jurisprudence, il n’y a donc pas de raison que le coronavirus échappe à cette logique. En effet, sauf éventuel cas particulier comme, par exemple, une contagion survenue lors d’un contact identifié avec une personne infectée, la contagion, en l’état actuel des connaissances médicales, ne résulte pas d’un fait accidentel et ne peut pas avoir une date certaine, le salarié ne pouvant pas savoir avec précision s’il a contracté la maladie au temps et au lieu du travail.
La question de la reconnaissance de l’accident du travail pourrait néanmoins se poser en des termes différents s’agissant plus spécifiquement des collaborateurs qui auraient été envoyés en mission dans l’un des premiers foyers de contamination, avant que le virus ne soit présent en France. Dans un tel cas, le fait générateur de la lésion pourrait alors être le déplacement professionnel en tant que tel. C’est en tous cas ce qu’a déjà estimé la CPAM s’agissant d’une hôtesse de l’air envoyée dans un pays dans lequel est présent le virus Ebola. Si le collaborateur malade a dû se rendre dans l’un des premiers foyers de contamination alors que ceux-ci étaient déjà identifiés, la question de la reconnaissance d’une faute inexcusable de l’employeur pourrait d’ailleurs certainement se poser. En outre, même dans les cas où la contamination par le coronavirus ne pourrait pas être reconnue comme un accident du travail, cela n’exclut pas toute mise en cause de la responsabilité de l’employeur, au titre de son obligation de sécurité de résultat, s’il n’a pas pris toutes les mesures pour préserver la santé de ses salariés