Face aux conséquences de la crise sanitaire actuelle, de nombreux employeurs sont tentés d’alléger leurs effectifs en mettant fin aux périodes d’essai en cours.
Pour autant, ni la pandémie, ni même les conséquences de celles-ci sur l’activité de l’entreprise ne sauraient constituer un motif valable de rupture de période d’essai. En effet, si l’employeur est libre de rompre une période d’essai, il ressort d’une jurisprudence constante que la période d’essai étant destinée à permettre à l’employeur d’apprécier la valeur professionnelle du salarié, la résiliation du contrat de travail intervenue au cours de cette période pour un motif non inhérent à la personne de ce dernier est abusive (Cass. Soc. 20 novembre 2007 n° 06-41.212). Il en est ainsi si l’employeur n’a pas laissé au salarié un temps nécessaire pour faire ses preuves (CA Paris, 11 décembre 2008, n° 07-2548) ou lorsque que la rupture intervient pour motif économique (Cass. Soc. 20 novembre 2007 n° 06-41212).
Une rupture de période d’essai qui serait en réalité liée à la baisse d’activité actuelle et non aux compétences professionnelles du collaborateur serait donc abusive et ouvrirait droit à des dommages et intérêts en fonction du préjudice subi par le salarié. Nonobstant l’existence du barème d’indemnisation dont l’application n’est, en ce cas précis, pas clairement établie, cette indemnisation pourrait être relativement élevée, particulièrement dans le cas où un collaborateur aurait par exemple démissionné de son précédent emploi pour rejoindre l’entreprise.
L’employeur qui est confronté à une baisse d’activité qui ne lui permet pas de pouvoir apprécier de manière satisfaisante les qualités professionnelles du salarié en période d’essai a donc tout intérêt à le placer en chômage partiel total. La suspension du contrat de travail qui en résulte décalera d’autant le terme de la période d’essai et laissera donc à l’employeur toute latitude pour apprécier les qualités professionnelles du salarié une fois la crise passée.
Pour autant, il n’est pas inutile de préciser que la situation actuelle n’interdit pas de procéder à une rupture de période d’essai qui serait effectivement liée à l’appréciation des compétences du collaborateur. Toutefois, au regard de la probable suspicion qui pèserait sur toute rupture de période d’essai prononcée pendant cette situation économique compliquée, il pourrait exceptionnellement être opportun de motiver brièvement la rupture afin de pouvoir formaliser le lien avec un comportement professionnel insatisfaisant.
Enfin, rappelons que les délais de prévenance prévus à l’article L. 1221-25 devront en tout état de cause s’appliquer.