27,58 % de grévistes au total, 74,4% des conducteurs en grève pour la journée du 14 mai. Force est de constater qu’un mois et demi après l’annonce de deux à trois jours de grève par semaine, la mobilisation se maintient et le trafic est toujours aussi perturbé ; en moyenne, un TGV sur 3, un Transilien sur 5 circulent. Il est encore difficile à ce stade de mesurer les conséquences de ce mouvement sur la production des entreprises. En pratique, comment l’employeur gère les absences ou les retards des salariés ?
Les salariés empêchés de se rendre sur leur lieu de travail ou retardés du fait d’un mouvement social dans le secteur des transports pourraient considérer qu’il s’agit d’un cas de force majeure, qui est par définition un évènement imprévu, insurmontable et irrésistible.
Cette notion est toutefois entendue strictement par la Cour de Cassation. A titre d’exemple, lors du mouvement de grève de novembre et décembre 1995, un producteur de spectacles avait rompu de manière anticipée les contrats à durée déterminée des artistes et techniciens qu’il avait engagés invoquant comme motif de la rupture le fait que la soudaineté et l’ampleur de la grève des transports étaient imprévisibles et insurmontables et empêchaient les spectateurs de se rendre au spectacle. Pour autant, la Cour de Cassation a jugé que la seule circonstance que les déplacements des spectateurs pouvaient être compliqués ou allongés par le mouvement de grève qui affectait la région parisienne, ne caractérisait pas la force majeure (Soc. 7 avril 1999, 97-40.446).
La grève des transports n’est donc pas systématiquement assimilée à un cas de force majeure, même si elle pourrait vraisemblablement ne pas être appréciée de la même manière, notamment par le Conseil de Prud’hommes, si elle est invoquée par un salarié ou par l’employeur. L’un peut être empêché de travailler, l’autre doit fournir du travail.
En tout état de cause, l’employeur ne peut pas sanctionner un retard ou une absence pour fait de grève précisément si le salarié l’a informé des difficultés rencontrées, en présentant un justificatif de retard ou d’absence.
Les employeurs ne sont toutefois pas obligés de rémunérer le temps d’absence de leurs salariés sauf dispositions spécifiques prévues par la Convention Collective. Afin d’éviter la retenue sur salaire, le salarié peut compenser, avec l’accord de son employeur, son absence ou retard en récupérant les heures de travail perdues ou en posant un jour de congés payés ou un jour de réduction du temps de travail.
A l’instar des Préconisations formulées par Madame la Ministre du travail Madame Muriel Pénicaud, les solutions alternatives telles que le télétravail peuvent être privilégiées, encore faut-il qu’elles soient possibles et correspondent à la nature de l’activité.
Hasard du calendrier, la loi de ratification des ordonnances a été publiée le 30 mars dernier, soit quelques jours avant l’annonce de la grève perlée des cheminots.
Déjà fortement simplifiée par les ordonnances macron, la loi de ratification poursuit cette démarche de simplification en supprimant la distinction opérée dans l’ordonnance du 22 septembre 2017 entre le télétravail occasionnel et le télétravail régulier. Surtout, l’article L.1229-9-1 du Code du travail précise qu’en l’absence d’accord ou même de charte, lorsque le salarié et l’employeur conviennent de recourir au télétravail, ils formalisent leur accord par tout moyen. Est-ce la voie à privilégier en cette période perturbée ?
La Garanderie Avocats invite fortement les entreprises à amorcer une réflexion sur ce type d’organisation.