La proposition de loi du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires portant sur les discriminations capillaires au travail, validée par la commission des lois le 20 mars dernier, sera discutée aujourd’hui et demain devant l’Assemblée nationale.
Le texte vise à insérer dans les principales dispositions reprenant les motifs de discrimination prohibée (code général de la fonction publique, code pénal, code du travail), après le mot : « physique, » les mots : « notamment la coupe, la couleur, la longueur ou la texture de leurs cheveux ».
Le député à l’origine de cette proposition de loi a indiqué souhaiter lutter contre les discriminations subies en particulier par les femmes aux cheveux crépus qui portent le cheveu naturel, la coupe afro, des tresses…
Mais quel sera l’impact concret de cette loi, si elle est adoptée ?
Rappelons qu’aujourd’hui le Code du travail prohibe déjà 25 motifs de discrimination, dont l’ «apparence physique », qui sont repris notamment à l’article L. 1132-1 qui dispose : « Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de nomination ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte […] en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, de sa qualité de lanceur d'alerte, de facilitateur ou de personne en lien avec un lanceur d'alerte […]. »
Ainsi, en s’appuyant sur les textes actuels, la Cour de cassation a donc déjà sanctionné une différence de traitement liée à la coiffure.
Tel a été le cas par exemple dans une affaire médiatisée concernant un steward d’Air France pour lequel la Cour de cassation s’est basée sur l’interdiction des discriminations directement fondées sur l'apparence physique en lien avec le sexe pour estimer qu’il n’était pas possible d’interdire au personnel masculin une coiffure autorisée au personnel féminin, en l’occurrence des tresses africaines attachées en chignon (Cass. soc. 23-11-2022 n° 21-14.060).
L’intolérance en matière de coiffure peut donc d’ores et déjà être sanctionnée par les textes actuels : discrimination liée à l’origine et/ou l’apparence physique pour une coiffure afro, au sexe pour l’interdiction de port des cheveux longs qui ne concernerait que les hommes, à l’âge pour une mesure qui toucherait les cheveux blancs…
La marge de manœuvre de l’employeur qui souhaite régenter la coiffure de ses salariés est donc d’ores et déjà limitée puisque de telles consignes ne sont envisageables que :
Ces jurisprudences seront-elles remises en question par la nouvelle loi ?
Nul doute en tous cas qu’il conviendra d’être vigilant avant de sanctionner un collaborateur en invoquant un choix capillaire.